Le cognac

Notre but est ici de vous aider à mieux connaître le cognac. Rappelons tout d'abord que le cognac est obtenu par distillation des vins blancs produits sur l'aire d'appellation. Cela signifie que le premier travail est celui du vigneron cognaçais qui mène son raisin à maturité.

Cognac

Les cépages

L'appellation cognac limite les cépages utilisés pour l'obtention des vins blancs à trois variétés ; la Folle Blanche, l'Ugni Blanc et le Colombard.

La Folle Blanche fut le cépage maître en Charente, grâce à sa capacité à produire abondamment des vins blancs propres à la distillation. Son greffage a donné des souches plus vigoureuses, mais plus sensibles à la pourriture, ce qui fait préférer aujourd'hui l'Ugni Blanc aux vignerons Charentais.

L'Ugni Blanc porte également le nom de Saint-Emilion des Charentes. Ce cépage originaire d'Italie a été largement implanté en France au XIXe siècle. Il a dû son succès à sa très bonne résistance au phylloxéra, dévastateur de beaucoup de vignobles européens à cette époque. Il réunit par ailleurs les trois qualités nécessaires pour produire des eaux-de-vie de haute qualité, forte acidité, faible degré alcoolique (7° à 9°) et peu tanique.

Le Colombard est le dernier du trio. Il est originaire du terroir charentais et offre l'avantage de ne pas être exigeant en matière de terrain. Ce plant fertile produit un meilleur vin, plus riche en alcool et moins "dur" que celui obtenu avec la Folle Blanche. En revanche, logiquement, l'eau-de-vie que ce cépage produit est d'une qualité inférieure à celles tirées des deux autres cépages.

Sachez également que, dans le cadre de l'appellation, il faut que ces cépages, ou deux d'entre eux ou bien même un seul des trois, soit à l'origine de 90 % du ou des vins mis en œuvre dans la distillation.
Les cépages pouvant composer les 10 % restant sont :

Le Blanc Ramé, le Jurançon Blanc, le Meslier-Saint-François, le Montils, le Sauvignon, le Sélect et le Sémillon.

Le terroir

L'aire géographique de production du cognac couvre le département français de Charente-Maritime, une partie importante de la Charente et concerne quelques communes des Deux-Sèvres et de la Dordogne.

La délimitation de cette zone (AOC) date de 1909, elle se divise en plusieurs crus.

La vinification

Dans la logique développée plus haut (nécessité d'obtenir un vin peu alcoolisé et acide) pour faire un bon vin de "chauffe", précisons que la vinification charentaise n'a jamais atteint l'excellence qualitative, ce qui n'enlève rien à la qualité du travail fourni à cette étape ou à d'autres par les producteurs de cognac.

Depuis un décret de 1936, deux choses sont tout de même à relever sur l'appellation.

La première est relative à la pressurisation qui ne peut se faire dans des presses "continues" à vis d'Archimède. Elles sont trop puissantes, éliminent trop de moût et augmentent la présence de lies. Cela rend la distillation difficile et transmet souvent un goût de "brulé", ou de "rimé" aux eaux-de-vie.

Les producteurs de cognac utilisent donc des pressoirs plus doux, horizontaux, dits de type "Vaslin". Cette presse plus douce permet de préserver au mieux la qualité de moûts.

La deuxième tient à l'interdiction de recourir à la chaptalisation. Il est ainsi interdit aux producteurs de cognac de sucrer leurs moûts.

Quand la presse est terminée, le moût est mis en cuve pour que démarrent la fermentation alcoolique puis la fermentation malolactique, l'ensemble durant environ 20 à 30 jours.

Les vins ainsi obtenus sont conservés sur lies, sans autre apport jusqu'à leur distillation.

La distillation

La distillation a lieu dans des alambics Charentais, à feu direct, dits "à repasse", comptant parmi les plus simples qui soient.

Ces alambics sont composés d'une chaudière, surmontée d'un "chapiteau" renflé, en forme d'oignon, suivi du col de cygne qui se termine en un serpentin qui passe dans un bain réfrigérant. La majorité des alambics Charentais sont aussi équipés d'un réchauffe-vin qui permet de préchauffer le vin que l'on destine au prochain cycle de distillation.

Cette opération se passe en deux temps, on parle de "double distillation".

La première distillation du vin, que l'on porte à ébullition pendant une dizaine d'heures, permet d'obtenir le "brouillis", légèrement trouble et titrant de 24° à 32° d'alcool.

La seconde distillation consiste à réintroduire le brouillis dans l'alambic pour opérer la "bonne chauffe", durant une douzaine d'heures.

A ce stade, le distillateur sépare la première eau-de-vie et la dernière (tête et queue ou seconde) du "cœur de chauffe" qui sera seul à être recueilli pour devenir du cognac. Cette séparation nécessite une très grande expérience du distillateur pour décider du moment précis auquel elle doit être effectuée.

Il se sert alors du porte-alcoomètre (un instrument qui mesure le taux d'alcool), de son goût (il goûte l'eau-de-vie qui s'écoule) et de tout ce qu'il sait de l'art de distiller pour obtenir les meilleures eaux-de-vie. Ce choix intervient généralement quand le distillat arrive aux environs de 60° d'alcool, mais le producteur de cognac ne se contente pas de cette seule information pour en décider.

Ce processus de double distillation impose une surveillance de tous les instants. Le résultat de toutes ces attentions est une eau-de-vie incolore qui titre entre 68 ° et 72° d'alcool.

Pour chaque litre d'eau-de-vie obtenu, il aura fallu distiller environ 9 litres de vin.

La date limite de distillation est fixée au 31 mai suivant la vendange.

Ceci explique que la Charente vigneronne soit rythmée, durant tous les mois d'hiver, par les ambiances de chauffe et de vapeurs d'alcool.

Le vieillissement

Même si les eaux-de-vie juste sorties de l'alambic ont déjà de belles qualités aromatiques, il est impératif de les faire vieillir en fûts pour qu'elles s'épanouissent en se colorant au contact du chêne et qu'elles gagnent en finesse de goût tout comme en complexité d'arômes.

Les fûts donnant les meilleurs résultats à ces niveaux sont ceux assemblés à partir des douelles tirées des chênes de la fameuse forêt de Tronçais ou du Limousin, voisin de Cognac.

Il faut "préparer" ces fûts en y faisant séjourner les eaux-de-vie pour des périodes courtes (quelques mois pour celle qui inaugure le tonneau) et progressivement plus longue (une année pour la seconde) et bien plus pour les suivantes. Cette progressivité s'impose pour ne pas trop marquer le cognac avec les tanins d'un bois neuf.

Durant le vieillissement, l'eau-de-vie se bonifie aromatiquement en développant son bouquet. Elle prend aussi une belle couleur ambrée, perd de son volume par évaporation (la fameuse part des anges), diminue son taux d'alcool et gagne en souplesse.

Tout cela se passe grâce à l'échange harmonieux entre l'air ambiant et le produit par le jeu de la porosité des fûts. Cet échange permet, entre autres, l'oxydation, la formation du rancio et l'amélioration du bouquet.

Notons que l'évaporation permet le développement d'un champignon noir, le torula compniacensis, qui donne leur couleur caractéristique aux très vieux chais.

Si certains cognacs sont déjà prêts à être dégustés après 3 ou 4 ans de vieillissement, certaines eaux-de-vie de grandes origines peuvent s'exprimer totalement après 25, 30 ou 50 ans de repos, voire, plus.

Précisons enfin que le fût n'entre pas seul dans la bonification lente et progressive des cognacs. Pour que ce vieillissement soit optimal il faut absolument que les chais dans lesquels il se déroule soient à la juste hygrométrie. Trop d'humidité et le cognac risque de manquer de caractère, d'être "lourd". Une atmosphère trop sèche entraîne une évaporation régalant trop les anges, avec le risque de donner des eaux-de-vie sèches et dures. Il faut aussi que l'air puisse circuler dans les chais.

Néanmoins, la part de mystère subsiste, trop de paramètres, connus ou non, entrent dans la recette d'un vieillissement réussi pour que l'on puisse le rationaliser.

Lorsque le maître de chai estime qu'une eau-de-vie est arrivée à maturité, il décide d'arrêter son évolution. Il doit pour cela l'extraire de son fût de vieillissement et le passer dans un fût beaucoup plus vieux qui n'aura plus d'action sur le produit. Il peut ensuite passer le cognac dans de grandes bombonnes de verres (les Dames-Jeannes) qui arrêtent totalement l'évolution des Cognacs qu'on y entrepose.

La mise en bouteille qui suit permet au cognac d'être commercialisé et consommé ou "attendu" en conservant ses qualités d'eau-de-vie harmonieusement vieillie.

Les coupes ou coupages

Deux options s'offrent au producteur de cognac en matière d'assemblage.

La première sera de décider que certaines parts de sa production renferment, à son avis, toutes les qualités nécessaires pour vieillir sans avoir besoin d'être épaulées par des mélanges avec des cuvées, des crus ou des produits différents. Dans ce cas, il décide de ne faire aucun assemblage et de ne rien ajouter à l'eau-de-vie de départ.

La seconde consiste à décider de bonifier un produit en recourant aux qualités et particularités de plusieurs eaux-de-vie pour en faire un tout homogène et harmonieux.

La tradition cognaçaise veut que la coupe soit largement pratiquée.

Il faut alors que le maître de chai opère avec perspicacité en assemblant des eaux-de-vie, certes différentes, mais dont il sait que le mariage permettra d'arriver à "magnifier" l'ensemble.

Les mariages se font dans de qui facilitent les remuages nécessaires à l'homogénéisation du tout.

Les mariages de saveur, d'arômes et de couleurs peuvent aussi être facilités par l'apport de caramel ou de sirop de sucre (au plus 2% du volume total de cognac mis en œuvre).

En fonction des goûts du public auquel s'adresse le cognac, la maison peut décider de certains autres apports. On sait, mais on ne le dit que très peu, que certaines couleurs foncées ou saveurs de vieilles eaux-de-vie sont obtenues par l'ajout d'un "composé" à base de copeaux de bois.

La réduction

Nous avons précisé plus haut que le cognac sort de l'alambic en titrant 68° à 72° d'alcool. La plupart des eaux-de-vie de cognac mises sur le marché titrent environ 40° à 42° d'alcool. Nous savons que chaque année de vieillissement fait perdre environ un degré au cognac.

Le calcul est donc simple, si l'on veut que le cognac arrive à 40° d'alcool sans intervenir, il va falloir le faire vieillir à peu près 30 ans (70° - 30° = 40°).

Sachez tout de même que la grande majorité des producteurs de cognac ne peuvent attendre 30 ans avant de vendre leurs eaux-de-vie. Ils recourent donc, pour la plupart, à la réduction (dilution) à l'eau distillée ou avec un cognac très faiblement alcoolisé. Cette réduction ne se fait pas brutalement, mais en plusieurs étapes successives qui s'étalent sur plusieurs mois.

Les crus

Il en existe 6 différents qui donnent chacun des eaux-de-vie particulières.

• La Grande Champagne (13000 ha)

Donne les cognacs les plus fins et légers, très recherchés. On dit qu'ils sont les plus « nets » et les plus « racés ». Ils gagnent grandement à vieillir pour que s'épanouissent leurs arômes de sarments et de tilleul

• La Petite Champagne (16000 ha)

Plus sujet à l'influence océanique, ce cru donne naissance à des eaux-de-vie un peu moins fines et plus "corsées" qu'en Grande Champagne voisine.

• Les Borderies (4000 ha)

C’est le plus petit cru des 6. Il bénéficie d'un microclimat et permet d'obtenir des cognacs ronds, fins, aux doux arômes de violette, plus rapidement prêts à être dégustés que les précédents.

• Les Fins Bois (34000 ha)

Produisent des eaux-de-vie au vieillissement rapide, rappelant souvent des arômes de raisins fraîchement pressés.

• Les Bons Bois (12000 ha)

Sous l'influence du climat Atlantique, ces cognacs sont un peu plus rudes et vieillissent assez vite.

• Les Bois Ordinaires (1600 ha)

S'étendent le long de l’océan Atlantique, mais aussi sur l'ile de Ré et l'ile d'Oléron. Les eaux-de-vie produites ici ont un fort accent de terroir.

L'appellation "Fine Champagne" implique que les cognacs proviennent exclusivement des deux Champagnes, Grande et Petite, avec au minimum 50% de Grande Champagne.

Le cognac "Grande Fine Champagne" est une eau-de-vie constituée à 100% de cognac provenant de Grande Champagne.

L'autre appellation "Petite Fine Champagne" désigne les cognacs dont l'origine est issue de la Petite Champagne.

Lire l'étiquette

Vous êtes nombreux à avoir déjà observé que les étiquettes de cognac comportaient des indications sans pour autant pouvoir les interpréter.

Nous allons essayer de vous éclairer un peu :

*** ou V.S. (Very Special) ou Sélection ou encore de Luxe sont des indications qui signifient que la plus jeune eau-de-vie contenue dans la bouteille a au moins 30 mois de vieillissement en fût. Ces cognacs, de qualité courante ont généralement un âge moyen allant de 5 à 7 ans.

*****ou Cuvée Supérieure ou Grande Sélection pour des eaux-de-vie, les plus jeunes, ayant passé au moins 3 ans en fût.

Vieux ou V.O (Very Old) ou V.S.O.P. (Very Superior Old Pale) ou Réserve pour des eaux-de-vie, les plus jeunes, ayant passé au moins 4 ans et demi dans le bois.

Extra ou Impérial ou Napoléon ou Royal ou Très Vieux ou Vieille Réserve ou X.O. pour des eaux-de-vie, les plus jeunes, ayant passé au moins 6 ans en fût. Ce sont les eaux-de-vie qui contiennent les cognacs de grand âge, les plus vieux pouvant avoir 20, 30, 40, 50 ans et plus.

Il se peut, par ailleurs, que vous trouviez des cognacs millésimés. Ils sont alors, comme pour les vins, le fruit d'une seule vendange.

Comment boire le cognac ?

Nous vous conseillons tout d'abord de déguster votre cognac, s’il est seul, en digestif par exemple, dans un verre dit "tulipe". C'est celui qui restituera avec le plus de fidélité toute sa complexité aromatique. Prenez le temps de l'admirer dans ce verre, essayez d'en percevoir l'onctuosité. Laissez-vous séduire par le premier nez avant de tourner le verre pour permettre au bouquet de s'épanouir. Le second nez peut alors compléter, infirmer ou confirmer vos premières impressions. Prenez le temps de "lire" ensuite les saveurs en bouche, associées au nez.