Après que votre choix aura été arrêté (voir chapitre “accords mets et vins”), il est nécessaire d’extraire les bouteilles de leur lieu de stockage et de les placer quelques heures, voire une journée, dans la cave même, en position verticale, et ceci que le vin soit jeune ou vieux, blanc ou rouge.
En effet, certains vins présentent des dépôts et éléments volatiles qu’il n’est jamais très agréable de retrouver dans le verre. Ces dépôts ne sont pas nécessairement dus au vieillissement du vin, ils proviennent le plus souvent des interventions précédant la mise en bouteille et plus particulièrement de la filtration qui est de plus en plus souvent extrêmement légère. Ce choix du vigneron est retenu pour maintenir le vin au plus proche de son terroir, sachant que chaque intervention lui étant apportée l’appauvrit et l’éloigne de son caractère originel. Ces dépôts sans gravité n’en sont que la conséquence.
Il est toujours préférable de prévoir large pour le nombre de bouteilles, rien n’est pire que d’observer des verres vides, et une bouteille peut parfois se révéler bouchonnée. La règle de prudence est celle d’une bouteille par personne, tous vins confondus.
Il faut ici prendre en compte la température de la cave et celle de la pièce de service. Il est en effet indispensable d’adapter la température du vin tel qu’il est dans la cave à celle du service, soit en l’abaissant dans un réfrigérateur ou un seau à glace, soit en l’élevant (chambrage). Le vin n’aime pas du tout ces nécessaires manipulations et si les températures de cave et de service coïncident, (ce qui est souvent le cas pour les vins blancs), il est souhaitable de lui éviter toutes ces opérations en le montant à la dernière minute.
Cette étape franchie, les bouteilles sont montées de la cave dans un panier à bouteilles, sans heurt et avec la plus grande précaution, afin d’être entreposées, toujours verticalement, dans le local le plus adapté, le réfrigérateur (éviter le rangement dans la porte qui fait l’objet de fréquents mouvements), le seau à glace ou la pièce même de consommation. (voir ci-après, chapitre “température”).
Il est toujours prudent d’ouvrir les bouteilles à l’avance avant l’arrivée de vos convives. Malgré les idées reçues, cette opération n’a pas pour but d’aérer le vin, en effet les quelques centimètres carrés de contact avec l’air ne permettent pas la moindre évolution des 75 cl que contient la bouteille, mais a pour but de la goûter et de s’assurer qu’elle est parfaite à boire, vous laissant ainsi le temps de réagir si problème il y a. Pour ouvrir les bouteilles, il faut, à l’aide d’un couteau ou d’un accessoire prévu à cet effet, sectionner la capsule au milieu du bourrelet (c’est plus joli qu’au dessus ou qu’au-dessous) ; puis, avant d’extraire le bouchon, passer un papier absorbant légèrement humide sur le verre apparent et le dessus du bouchon, ceci pour éliminer les éventuelles moisissures.
Extraire le bouchon avec précaution à l’aide d’un tire-bouchon adapté et si possible évitant au vin toute secousse. Sentir le bouchon (côté vin), bien que cela n’ait pas un grand intérêt (encore une idée reçue), certains bouchons n’émettant aucune odeur sur un vin bouchonné ou le contraire, puis goûter le vin. Si tout va bien, poser le bouchon sur la bouteille (les petits moucherons l’aiment beaucoup), côté vin du bouchon vers le bas, contre le verre, (le côté cave, plus facilement champignonné pouvant apporter un mauvais goût au premier verre servi).
Chacun a pu observer qu’un vin, dont il attendait beaucoup à un repas, s’est révélé décevant et que le fond de bouteille bu quelques heures plus tard délivrait toutes les attentes. Ce vin, durant ce temps, s’est aéré et s’est ouvert pour offrir ce qu’il avait de meilleur. Cette évolution peut être volontairement provoquée pour permettre au vin d’être au meilleur de lui-même au moment choisi, c’est ce que l’on appelle la décantation, ou mise en carafe. Voilà comment procéder : après avoir goûté le vin, en verser quelques centilitres dans la carafe et l’y faire tourner violemment sur toute sa surface, en plaçant la paume de la main sur le goulot, c’est ce que l’on appelle enviner la carafe. Cette opération permet d’éliminer les éventuelles poussières qu’elle pourrait contenir et la prépare à recevoir le vin. Vider bien entendu la carafe, l’égoutter quelques secondes et verser le vin qu’on lui destine avec précaution, en s’efforçant de le faire se déployer le plus largement possible sur la face intérieure de la carafe (c’est ce qui provoque l’aération). Une bougie ou une simple lampe électrique peut être disposée sous la bouteille afin d’arrêter cette opération avant que le dépôt ne se glisse dans la carafe.
Il est essentiel, avant de décanter, de très bien connaître son vin, car cette opération provoque un choc brutal qui peut lui être fatal, lui faisant perdre, s’il est vieux, les arômes généralement magnifiques qu’il peut offrir, sans espoir de retour. Elle peut être utilisée pour des vins évolués mais non aboutis, pour des vins jeunes, pour des vins riches en gaz carbonique (volontairement maintenu dans certains vins rouges de très longue garde où il assure un vieillissement naturel, et dont la perception disparaît avec le temps). Mais cette pratique de la décantation est aussi valable pour les vins blancs et pour les très grands Champagnes, mais encore une fois, il est indispensable de bien connaître les besoins précis du vin servi.
Lorsqu’il s’agit d’éliminer le dépôt d’un très vieux vin, il est préférable de disposer les verres alignés face à soi sur une desserte et de les remplir l’un après l’autre en appliquant à la bouteille le juste nécessaire mouvement de va-et-vient jusqu’à apparition du dépôt, puis de servir les verres immédiatement à chacun des convives. C’est là la solution la plus prudente.
Lorsqu’un vin rouge a dépassé ses propres limites et qu’il s’est vidé de sa substance, il reste la solution de le verser dans une carafe dans laquelle on aura préalablement introduit quelques centilitres de Porto. Cette «transfusion» lui redonnera quelques heures l’illusion de la jeunesse.
C’est là un point d’une extrême importance, car le vin peut être totalement détruit par le non-respect de certaines règles élémentaires. Le froid a sur le vin trois incidences, celle de bloquer les arômes, d’accentuer sa vivacité (ou son acidité), et d’étirer son profil. La chaleur au contraire provoque l’effet inverse. Pour tous les vins, il est important de respecter la faible marge de manœuvre qui varie selon l’appellation, le type (sec ou doux) et l’âge (voir ci-dessous «Quelques règles…»). Il est également indispensable de considérer qu’un vin dans un verre s’élève très vite en température et que si la pièce est chauffée, il prendra en quelques minutes quelques degrés supplémentaires à ceux prévus initialement. Ainsi, faut-il prévoir deux à trois degrés de sécurité selon la pièce ou la saison.
Pour rafraîchir un vin blanc, opter pour le réfrigérateur en surveillant de près la température pour qu’il n’arrive pas à table glacé. Si l’on choisit l’option seau à glace, celui-ci doit être rempli d’eau et de glaçons au maximum de sa contenance afin que la bouteille y trempe intégralement et que l’ensemble du vin soit rafraîchi, faute de quoi les premiers verres seront servis chauds. Quand il s’agit d’amener un vin rouge à sa température, c’est-à-dire de le chambrer, pas de brusquerie, éviter la proche présence des radiateurs et du feu de la cheminée, le laisser s’adapter lentement, juste ce qu’il faut et le plus tard possible.
Vins rosés en été |
Toutes régions |
11 / 13° |
Vins rosés hors été |
Toutes régions |
13 / 15° |
Tous vins blancs jeunes, |
Loire, Alsace, Savoie, |
11 / 13° |
Tous vins blancs jeunes, |
Bourgogne, Rhône, Loire, |
13 / 15° |
Vins blancs moelleux jeunes |
Bordeaux, Sud-Ouest, |
11 / 13° |
Vins blancs moelleux âgés |
Bordeaux, Sud-Ouest, |
15 / 17° |
Tous vins rouges, |
Toutes régions |
13 / 15° |
Grands Bordeaux rouges jeunes |
15 / 17° |
|
Grands vins rouges âgés |
18 / 20° |
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Grands Bourgognes rouges jeunes et grands vins du Rhône, Provence |
14 / 16° |
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Grands Bourgognes rouges âgés et grands vins du Rhône |
17 / 19° |
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Grands Bourgognes blancs jeunes et grands vins du Rhône |
13 / 15° |
|
Grands Bourgognes blancs âgés et grands vins du Rhône |
15 / 17° |
|
Champagnes et tous vins effervescents |
Loire, Alsace, Bourgogne, |
12 / 14° |
Grandes cuvées de Champagne |
15 / 17° |
|
Vins jaunes |
Jura |
16 / 18° |
Vins Doux Naturels blancs |
Rhône, Languedoc, Roussillon |
12 / 14° |
Vins Doux Naturels rouges jeunes |
Rhône, Languedoc, Roussillon |
12 / 14° |
Vins Doux Naturels rouges âgés |
Rhône, Languedoc, Roussillon |
15 / 17° |
Eaux-de-Vie blanches |
de fruits, de baies ou de grains |
3 / 5° |
Eaux-de-Vie blanches |
de fruits ou de baies |
14 / 16° |
Eaux-de-Vie classiques |
Cognac, Armagnac, Calvados |
18 / 20° |
Un vieil adage dit «le vin que l’on boit ne doit pas faire regretter celui que l’on vient de boire», autrement dit la succession des vins doit aller crescendo, du plus léger au plus riche. Les vins blancs doivent précéder les vins rouges, les vins jeunes, les vins vieux. Toutefois cette règle n’est pas absolue, car certains vins blancs peuvent parfaitement passer après des rouges, s’ils sont riches en arômes (Gewurztraminer), en texture (Vin jaune) ou en saveurs (Sauternes). En ce qui concerne l’âge des vins, il faut également considérer qu’au sein d’une même région voire d’une même appellation, certains millésimes évoluent plus rapidement que d’autres. Ainsi un vin jeune peut-il être plus évolué qu’un vin âgé moins avancé. Là aussi, il est important de bien connaître son vin ou de se faire bien conseiller.
Pour la meilleure appréciation du vin, il ne faut pas hésiter à investir dans des accessoires de qualité tel le tire-bouchon qui doit être à «queue de cochon» et si possible à vis sans fin. Ce modèle de fabrication américaine est disponible chez tous les cavistes, il n’a pas son égal pour ouvrir les bouteilles.
Le thermomètre à vin est indispensable avant et pendant le service, c’est le garant de la qualité.
La carafe, toujours indispensable, doit être de cristallin ou de cristal, totalement translucide, galbée et ne comportant aucun angle brisé, (contrairement à celles réservées aux eaux-de-vie), elle ne doit porter aucune gravure ou incrustation et être aussi pure que possible, car elle est l’écrin du vin et doit s’effacer devant lui.
Le choix des verres est également de la première importance, celui-ci devant être à pied, galbé, et resserré dans sa partie supérieure afin de concentrer les arômes du vin. Le buvant, c’est-à-dire la partie qui est appelée à entrer en contact avec la lèvre, doit être aussi fin que possible pour se faire tactilement oublier au profit du seul vin. Là aussi, pas de motif, ni de gravure, ni d’incrustation. Les verres régionaux sont souvent plus folkloriques qu’utiles, et il vaut mieux porter son choix sur un bon verre en cristallin qui valorisera le vin et que l’on pourra utiliser en toutes circonstances, plutôt que sur un accessoire maniéré cherchant à s’imposer sur son aspect.
Attention toutefois, certains vins (tels les Bourgognes rouges) doivent être bus avec largesse, à bonne lampée, car ce sont des vins d’arômes et de délicatesse qui justifient le choix d’un verre ample (sans tomber dans l’excès), au contraire des vins de Bordeaux qui sont des vins de texture, exigeant une absorption plus mesurée.
Enfin, il est de tradition de présenter sur la table le plus grand verre pour l’eau et les petits pour les vins, ce qui est contre la nature même de l’amateur qui ne doit pas hésiter à bousculer cette règle stupide, chez lui comme au restaurant.