Le millésime est l'année de naissance du vin et sa notation correspond en réalité à celle des conditions climatiques dont a pu bénéficier le raisin, et donc indirectement le vin qui en est issu. Toutefois, ce propos doit être relativisé…
En effet, l'importance que de nombreuses personnes donnent encore aujourd'hui au millésime reste très attachée à la notion qui y était appliquée il y a quelques décennies, alors que les connaissances et informations dont profitent aujourd'hui les vignerons pour mener dans les meilleures conditions les opérations qui se succèdent de la taille jusqu'à la vendange, n'étaient pas, bien entendu, à leur disposition.
Autrefois, la science œnologique, quasiment empirique, ne permettait que très modestement de pallier aux conséquences des conditions météorologiques défavorables et, en mauvaise année, le vigneron se voyait le plus souvent contraint de récolter un raisin ni toujours très mûr, ni toujours très sain, et de faire le vin qu'il pouvait avec cette matière première que la nature lui imposait. Aujourd'hui de nombreux traitements préventifs et curatifs (et sans conséquences) sont disponibles et permettent de récolter chaque année un raisin exempt de toute pourriture ou maladie. Bien entendu, même aujourd'hui, les raisins d'une petite année ne peuvent égaler ceux d'une grande, mais désormais (sauf à le faire exprès) un vigneron récoltera à chaque vendange, et quelle que soient les conditions météorologiques, un raisin sain.
Considérons par exemple les progrès faits en matière de prévisions météorologiques : si un vigneron sait qu'après une période de pluie, il profitera de quelques jours de soleil, il lui devient possible d'attendre pour vendanger dans les meilleures conditions. Ainsi cette notion de millésime a-t-elle perdu une partie de son importance, car à celle de "mauvais millésime" ne correspond plus jamais l'image de "mauvais vin". Il est beaucoup plus logique de considérer les années "faibles" non comme mauvaises, mais comme petites, et de prendre ces données en considération pour estimer à son profit la silhouette générale du vin de l'année, son espérance de garde et l'utilisation que l'on pourra en faire le moment venu.
La maîtrise aujourd'hui parfaitement connue de la transformation du jus de raisin en vin permet au viticulteur d'en assurer le contrôle et donc de nous garantir chaque année un produit de qualité et ce, quelles que soient les conditions climatiques ; de plus, les vignerons ont aujourd'hui les moyens financiers de s'offrir les services de spécialistes qui, dans tous les domaines qui les touchent professionnellement, peuvent les guider et les conseiller. Ils ont également la possibilité d'investir dans des équipements qui leur permettent l'élaboration de vins parfaitement réussis, quelle que soit la région et l'appellation dont ils dépendent.
Ainsi, aujourd'hui est-il normal pour nous, consommateurs, de considérer que nous buvons, quel que soit le millésime, les meilleurs vins qui n'ont jamais été faits, et que cette chance n'était pas celle des générations précédentes qui devaient se contenter du vin des années les plus clémentes.
Les vins ne disposent pas tous des mêmes dispositions à vieillir et certains d'entre-eux perdent leur qualité à trop attendre en bouteille, certaines règles, d'ordre général, peuvent être prises en considération, l'exception pouvant toutefois confirmer la règle.
Bonne ou mauvaise année doit se traduire par « courte ou longue garde » !
1984, 1987, 1992 on été des années où, dans presque toutes les régions, le climat a été avare de soleil, brutal et trop arrosé pour les vignes. Ces années-là ont donc donné des vins à courte espérance de vie. De « petits » millésimes. A l’inverse, 1995 a été une année au climat favorable partout en France. Tous les vins AOC qui en résultent peuvent donc prétendre à être de longue garde. De « grands » millésimes.
La différence de longévité est aussi liée au cépages, terroirs et savoir-faire de chaque producteur. Aussi faudra-t-il analyser région par région tous ces critères pour augurer des espérances de vie de chaque vin.
Mais au fait que cherche-t-on avec un vin ? Le plaisir tout simplement.
Un château Pétrus 1959 est bien sûr un must. Millésime exceptionnel pour ce Grand Cru classé. Votre palais s’en souviendra. Votre portefeuille aussi. Ne peut-on pas se faire autant plaisir avec un vin plus modeste ?
Bien sûr que si. Regarder l’année, l’AOC, la signature du producteur. Buvez les millésimes des petites années à temps. Ce sera à moindre frais et avec un maximum de plaisir.
Les millésimes anciens des grands crus atteignent vite des sommets de raffinement comme de prix. Leur valeur exponentielle double tous les cinq ou six ans. Alors la seule solution est souvent de se constituer sa propre cave. Ces bouteilles de longue garde vous feront conserver le souvenir des années qui passent pour pouvoir se le remémorer dans trente ans avec vos petits-enfants.