La saison des vendanges

Quand arrive la fin de l’été, les villages et les coteaux s’animent. Les chaleurs de la mi-août sont passées, il est 7 h du matin dans la campagne déserte. Un homme marche entre les rangs de vignes, un grand sac à la main. Il s’arrête, ramasse quelques grains, qu’il compte avant de les enfourner dans un sachet.

Vendanges

Celui qui passe ainsi d’une parcelle à une autre, goûtant un grain et en ramassant une poignée à droite ou à gauche, serait-il un voleur de raisins ? Sûrement pas, c’est un vigneron qui fait ses “prélèvements”. Les sachets seront amenés au laboratoire afin d’être analysés. Une fois qu’il connaîtra le poids des baies, leur teneur en sucre et en acidité, le vigneron saura à quel stade de leur maturité sont parvenues ses vignes. Cette promenade matinale, il la refera la semaine prochaine et puis encore, jusqu’à décider que telle parcelle est prête, en fonction de son orientation, de son cépage et de l’âge des vignes. La vendange pourra commencer, au moment idéal.

La tradition a du bon

Même si les vendanges ne se passent plus comme sur les images d’Épinal où hottes et paniers servent de décor à des fêtes, elles demeurent un moment unique de tension et de joie, qui couronne douze mois de travail. Dans le Beaujolais, les grandes équipes de vendangeurs sont au rendez-vous de septembre : pas moins de 300 000 personnes par an, pour ramasser une moyenne de 500 kilos de raisin par jour. Pourquoi ? Parce que la vendange demeure ici manuelle : le vignoble est très dense, avec moins d’un mètre entre deux ceps, aucune machine ne saurait s’y glisser. De plus, il est planté en cépage Gamay, un raisin qui est vinifié en grappe entière. De même, tous les vignobles qui produisent des vins effervescents de qualité, Champagne en tête, récoltent à la main. C’est la loi, et aussi le bon sens, qui veut que l’on respecte l’intégrité des raisins. Les vendanges tardives d’Alsace, les Sauternes, les moelleux du sud-ouest et de Loire sont aussi vendangés à la main, puisque chaque grappe ou portion de grappe doit être choisie une à une. Ces vendanges dites par tries donnent naissance à des vins doux aux parfums complexes.

Apprendre à couper

Pour le vendangeur novice, la première leçon est claire : il faut attraper la grappe bien dans la main gauche et attendre d’avoir vu ses propres doigts avant de couper. Cela semble élémentaire, mais pas si simple lorsqu’on est accroupi au milieu des feuilles : quiconque a ainsi appris à repérer ses doigts n’oubliera de sa vie ce geste. Ni les courbatures qui martyrisent son dos ou ses cuisses. L’important est de tenir les trois premiers jours explique Annie Loron, propriétaire avec son mari à Chénas et qui accueille une trentaine de vendangeurs chaque année. Dès 8h, les coupeurs, penchés ou à genoux, déposent les grappes dans des seaux ou des cagettes. Les hotteurs et les porteurs, prennent le relais jusqu’à la cave où le pressoir est souvent en marche jusqu’au milieu de la nuit... La majorité du vignoble français est aujourd’hui mécanisée pour la vendange. Certes, le folklore disparaît, mais la machine à vendanger a ses défenseurs. Économique et rapide, elle permet à une personne seule de ramasser au moment idéal, entre 4 et 8 h du matin par exemple, ce qui aurait pris une journée à quatre douzaines de bras. Elle secoue les ceps pour faire tomber les raisins, qui sont transportés sur tapis roulant, tandis qu’une soufflerie les débarrasse des feuilles. L’avantage est que les raisins non mûrs ou abîmés restent accrochés à la grappe au lieu d’entacher la qualité de la récolte.

Moment de labeur intense et de stress pour le producteur, la vendange est aussi l’occasion de faire la fête. Le dernier jour, elle porte un nom différent dans chaque vignoble, gerbaude à Bordeaux, cochonet en Champagne ou paulée en Bourgogne.

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